Grève de la faim
Une petite Solitude pas marrante du tout. Il en faut. En août 1996, des sans-papiers retranchés dans l’église St Bernard, à Paris, défiaient les forces de l’ordre chargées de les expulser. À l’intérieur, outre les mères et les enfants, plusieurs grévistes de la faim ; dehors, un certain nombre de sympathisants (dont Sylvain et moi) prêts à intervenir en cas d’assaut des CRS.
Or, en raison du week-end, cet assaut se faisait attendre. Nous campions donc avec nos camarades — parmi lesquels plusieurs célébrités, rappelez-vous : Marina Vlady, Emmanuelle Béart, le professeur Jacquard...— autour du bâtiment, guettant l’inéluctable. Or, malgré notre angoisse et notre indignation, au bout de vingt-quatre heures quasiment sans manger, nous avions tous la dalle. Laissant Sylvain sur place, je file acheter des sandwichs à boulangerie la plus proche.
Soudain, tandis que je distribue mes baguettes au jambon, un amas de vieux sacs de couchage se soulève et une tête furibonde en jaillit.
— Non mais ça va pas ? me hurle en pleine face un jeune homme aux cheveux longs. Vous pourriez respecter ma grève de la faim, quand même !
Oups, pardon ! J’ignorais qu’il y avait aussi des grévistes sur le parvis...
Ça nous a coupé l’appétit.