Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
10 juillet 2014 4 10 /07 /juillet /2014 22:10

                                                  Les nourritures terrestres

 

       Ma  mère, qui avait été, tout au long de sa vie, pétrie d’a-priori, changea, sur ses vieux jours. Rigoureuse —  voire rigoriste —,  adepte forcenée d’une alimentation saine et naturelle, elle se laissa gagner par  les « vices » de l’époque que son esprit défaillant n’était plus à même de contrer. Penons le Coca-cola, par exemple, qu’elle vouait depuis toujours aux gémonies.  

        — Le Coca, c’est le diable, répétait-elle souvent.

        Et d’affirmer que cette boisson chimique, importée des Etats-Unis,  provoquait le cancer et rongeait les boyaux.

         Jusqu’au jour où Olivier, par une sorte de revanche facétieuse, lui proposa de goûter « une tite gorgée, pour voir » .  Ô surprise, elle trouva cela délicieux, se resservit un verre et finit la bouteille.

       Idem pour le cannabis dont je lui fis une tisane « pour l’aider à dormir ».  Le résultat dépassa mes plus folles espérances. Elle qui, d’ordinaire, était insomniaque, passa une si bonne nuit  que je récidivai, le lendemain. L’effet placébo ayant sans doute joué, elle ne cessa, dès lors, de chanter les louanges de « cette plante miraculeuse qu’on devrait prescrire d’office à toutes les vieilles personnes »  et m’en réclama chaque soir.

         De sorte que  je bénis la maladie d’Alzheimer qui, en altérant sa personnalité, lui permit de découvrir, avant de nous quitter, des voluptés insoupçonnées

Partager cet article
Repost0

commentaires

G
bien vu et bien pensé
Répondre
P
Hé, hé, c'est souvent quand on a plus rien a perdre qu'on change... La preuve avec ta maman ^^
Répondre
M
Ahahaha c'est vrai, je m'en souviens de cette histoire de tisane ! C'est extra, j'aurai aimé avoir l'occasion d'en boire une petite avec elle, à défaut de partager un pétard !
Répondre
G
Va savoir, Annie, va savoir...
Répondre
A
Gudule, tu as été une fille exemplaire d'avoir permis à ta mère de vivre sur le tard une adolescence dont, peut-être, elle fut privée… Et je ne plaisante pas…
Répondre